LE BEAU MÉTIER D’AUBERGISTE
Dans un décor de carte postale, perchée à 1500 m d’altitude dans la vallée des Belleville en Savoie, la Bouitte disparaît sous une épaisse couche de neige après les premières chutes. Franchissant le seuil, on pénètre dans le royaume des “Meilleur”, un intérieur savoyard soigneusement préservé. Ici, pas de convenances déplacées, on vient comme on est, même en chaussures de ski ! Dans ce hameau de montagne, l’accueil et la cuisine ne sauraient être les mêmes qu’en ville, ou dans la vallée. Ça a toujours été comme ça, c’est notre métier, souligne René Meilleur, nous sommes des aubergistes, nous recevons nos clients pour un repas ou pour passer la nuit et se relaxer. Les clients nous donnent leur temps. A nous de les satisfaire !
L’authenticité est la signature de la famille Meilleur, une ligne directrice qui donne toute sa personnalité à la Bouitte, passant d’un restaurant au bas des pistes à une référence internationale de la gastronomie. Sans jeu de mot, nous voulions juste être les meilleurs, s’amuse René Meilleur. Malgré cette transformation, la « Petite Maison » (passée de 300 à 3000 m²), a conservé son atmosphère montagnarde, la famille Meilleur, son bon sens paysan et la cuisine, son ancrage savoyard. Elles sont restées elles-mêmes. C’est cela que les clients apprécient et qui a séduit le guide Michelin pour les porter au sommet et leur décerner trois étoiles. Autodidactes, les « Meilleur » savent d’où ils viennent. Cette évolution est venue naturellement, nous avons toujours fait bien, même des choses simples. Nous avons réfléchi à notre environnement et nous avons puisé dans notre terroir et nos traditions tous les produits et les idées de recettes, explique René Meilleur. Tout cela est normal et fait partie de notre ADN.
La Bouitte c’est surtout une histoire d’hommes, un père et son fils, René et Maxime Meilleur. Un duo complémentaire qui affiche une belle complicité. Chacun a une personnalité, un palais. Le palais de Maxime est proche du mien. Moi, c’est le goût qui m’intéresse, ce qui se passe dans le cerveau et dans le palais et qui n’a pas besoin d’être ultra sophistiqué, c’est ça le principal, résume René Meilleur. Pour retracer l’histoire et comprendre cette ascension, il faut s’attabler dans la belle salle à manger ornée de meubles de montagne, de vaisseliers garnis de cruches et de vaisselle d’art populaire et se laisser porter par les émotions. Maxime Meilleur est à la baguette au milieu de sa brigade coiffée de bérets blancs. Marie Louise, femme de René, veille sur le service en Maitresse de Maison et Delphine, compagne de Maxime, pilier de la maison, accueille les hôtes.
Passé les excellents amuses bouche, avec notamment une interprétation aérienne, « au lait » cru de la raclette, souvenir de l’ouverture du restaurant en 1976, le service du pain et du beurre est un sommet.
Les pains (faits sur place depuis 30 ans), au levain, au maïs ou à la pomme de terre écrasée sont des gourmandises à eux seuls. Ils témoignent de l’exigence maison et accompagnent à merveille le beurre travaillé ici en trois façons, au fromage sérac, fumé au foin, ou fondu.
Pour compléter cette expérience, la carte des vins qui ne compte pas moins de 3000 références, est exceptionnelle. Des vins qui se modifient légèrement du fait de l’altitude. Le Meursault par exemple, habituellement porté sur la richesse, la rondeur, sera ici plus minéral...
Les entrées enchainent aussitôt de belles émotions.
• Belle déclinaison savoyarde de la soupe à l’oignon avec les Ravioles de reblochon, court bouillon d’oignon, rouelles frites.
• Puis le Foie gras de canard en escalope épaisse, galette de maïs frais, miel de Saint Marcel, réduit de vieux vinaigre. C’est le plus ancien plat de la Bouitte. L’accord parfait du foie gras et du maïs sonne ici comme une évidence.
Le canard est nourri au maïs, les deux sont intimement liés.
• Pour suivre, un plat emblématique de la maison, la Truite fario, cuisson au Bleu, accompagnée de beurre frais fondu, sabayon au carvi (le cumin des prés). Beaucoup de justesse dans ce plat qui révèle la finesse et l’extrême fraicheur de la truite juste pêchée dans le vivier à quelques mètres de la cuisine et pochée à l’eau vinaigrée.
Un plat éblouissant que l’on termine en sauçant sans réserve le sabayon au carvi avec un morceau de pain à la pomme de terre.
Cette cuisine d’évidence, c’est quelques minutes de préparation et 25 ans d’entrainement, analyse Maxime Meilleur. Grand sportif, ancien champion de Biathlon (il a été en équipe de France de biathlon avant de rejoindre son père en cuisine), il sait de quoi il parle. Cuisine et biathlon ont finalement beaucoup de similitudes, l’endurance, la concentration et la précision.
• La dégustation se poursuit avec un Lièvre, retour de chasse, risotto de petit épeautre, raisins tièdes, cuit à la perfection et qui révèle un goût fidèle mais délicat, affranchi des arômes trop forts de gibier.
• Une spectaculaire tour-charriot de quatre étages présente pas moins de 40 fromages différents.
• Un Jus de coing travaillé à la façon d’une bière, avec un joli faux-col fait une transition inédite vers les desserts.
• Enfin, le dessert blanc comme neige, autour du lait, décliné en meringue, biscuit, tuile, confiture, …
• Les surprises continuent sur le café avec des mignardises comme la Cruche, une douceur très régressive composée de beurre, de farine et de sucre.
De cette cuisine à quatre mains, René et Maxime sont reconnaissants l’un envers l’autre. Je suis encore là grâce à Maxime, avoue René et Maxime qui est « tombé dedans quand il était petit » a rejoint son père par amour du métier. Mais un Meilleur peut en cacher un autre, le fils de Maxime, 20 ans, est actuellement en formation dans l’une des plus belles adresses de Savoie. L’histoire continue pour les Meilleur et pour la Bouitte !
La Bouitte, un hôtel « fait maison »
Depuis son origine, la Bouitte a changé de dimensions. La petite Maison construite de leurs propres mains par René et Marie Louise Meilleur est devenue un hôtel de charme 5 étoiles, comptant 15 chambres et suites de luxe dans le plus pur style savoyard et classé aujourd’hui Relais & Châteaux.
Ici, le « fait maison », ne s’arrête pas à la cuisine.
René et Maxime participent à toutes les extensions avec la pelle et la pioche. Ils ne ressentent aucune obligation. La seule obligation, c’est nous disent -ils. Prochaine réalisation, la création d’une suite panoramique en surélévation d’un bâtiment.
Le spa La Béla Vya (la vie est belle), parfaitement équipé vient compléter l’ensemble : lac intérieur, hammam aux agrumes, sauna au foin, jacuzzi extérieur, massages, salle de fitness, cosmétiques et soins exclusifs.
Mais la “Meilleur” expérience ne s’arrête pas là. Simple & Meilleur, le bistrot à Saint Martin de Belleville, propose une cuisine régionale simple et vraie : Fondue, raclette, belle charcuterie, bon pain, truite aux amandes, ile flottante, poire au vin rouge, tarte tatin.
Et pour les skieurs, on retrouve les Meilleur à 2700 mètre avec un restaurant d’altitude.